L’inter-saison n’est pas un long fleuve tranquille pour les joueurs restés dans le Val-d’Oise. Depuis début Mai, nos Jokers travaillent fort en hors glace pour préparer la saison à venir, et toujours sous l’oeil aguerri du préparateur physique de l’équipe depuis déjà deux saisons : Alexis Tanguy. 

Rencontre avec l’homme de l’ombre qui travaille d’arrache-pied, tous les jours de la semaine, en dehors de la glace…

« Cette saison sera encore différente des deux saisons précédentes, nous allons tester d’autres façons de s’entraîner. »

Alexis Tanguy- Préparateur Physique ©️ Louis-Adrien Le Blay

Cette saison, tu vas entamer ta troisième saison en tant que préparateur physique de l’équipe première des Jokers, peux-tu dresser un bilan depuis ton arrivée ?

Pour les joueurs qui sont encore dans l’équipe, depuis ces deux dernières saisons, c’est un bilan assez positif qui s’en dégage : augmentation des performances (force, vitesse, explosivité, …) et diminution des blessures.

De plus, les joueurs sont assez réceptifs à toutes les méthodes d’entraînement que je leur propose ainsi qu’à tous les protocoles que j’ai expérimentés sur et bien malgré eux.

 

Selon toi, quel est le plus gros facteur que tu as apporté au sein de la préparation des Jokers ?

N’étant pas originaire du microcosme « hockey sur glace », je pense avoir apporté une vision différente de la préparation physique : des méthodes d’entraînement que les joueurs n’avaient pas ou plus l’habitude d’utiliser ainsi que ma passion pour les données et l’utilisation d’outils d’analyse/monitoring de la performance (capteur de vitesse, cellules, …).

Quels sont les joueurs qui t’ont le plus marqué ? pourquoi ? 

Question assez compliquée… Sur ces deux saisons, ils m’ont tous marqué, à leur façon. Cela reste une aventure humaine avant tout.

Mais si je devais choisir, chez les plus jeunes, pour commencer. Ce sont tous nos jeunes qui arrivent à concilier leur projet scolaire et sportif : les voir réviser dans le bus dans des conditions absolument pas optimales, enchaîner les matchs, les entraînements et les cours, les séances de hors glace très tôt/très tard, … Je pense, sans trop m’avancer, que beaucoup de jeunes de leur âge n’auraient pas la maturité ni l’abnégation nécessaire pour joueur une quarantaine de match, s’entraîner tous les jours sans broncher : cela force le respect.

Chez les « moins » jeunes, ce sont ceux qui arrivent toujours à revenir après des blessures. Quelques-uns de nos joueurs sont coutumiers de certains maux et, réussir à revenir à haut-niveau après une grosse blessure reste toujours une épreuve. Une épreuve physique mais surtout psychologique. Savoir qu’on va avoir mal après le match et qu’on consomme un peu plus, chaque match, son capital « santé » pour faire ce qu’on aime et jouer avec l’équipe, c’est louable. Qui plus est pour certains, en conciliant tout cela avec leur vie de famille et de papa.

Mais, pour éviter de faire de la langue de bois et si je ne devais en choisir qu’un : je dirais sans hésiter Vincent MELIN et son développé couché surréaliste.

« Le mérite revient aussi aux joueurs qui ont suivi les programmes et exercices malgré quelques exercices extravagants, je dois l’avouer. Mais toujours en râlant, preuve qu’ils vont bien ! »

Quelle est LA chose la plus importante, selon toi, dans la préparation physique d’une équipe de hockey sur glace ?

Contrairement à ce qu’on pourrait penser, ce n’est absolument pas « physique ». Au fond, je crois profondément à une transversalité des aptitudes athlétiques : tous les athlètes de sports collectifs doivent être rapides, forts et endurants ! Bien évidemment avec quelques spécificités qui, pour moi, représente 10% d’une préparation physique.

En revanche, la culture est LA chose la plus importante dans une équipe, tout sport confondu. Comme je l’ai dit plus haut, je ne viens pas du Hockey et la culture dans mon sport de prédilection est totalement différente : il faut savoir s’adapter, au mieux et au plus vite. Tout chambouler dans une équipe revient à mettre en péril l’équilibre du groupe et de voir un manque d’adhésion du collectif aux contenus proposés.

La saison passée fût intense mais néanmoins limitée en blessures (malgré les quelques joueurs écartés quelques jours ou semaines pour certains) Est-ce lié, en partie, au travail effectué en hors glace ?

Chaque partie du staff sportif porte la responsabilité de cette réussite : la communication avec le staff médical ainsi que la gestion des petits « bobos », l’adaptation de la charge d’entraînement avec Miika et Dako sur glace, … Tous se sont accordés dans l’optique de faire performer l’équipe.

Le mérite revient aussi aux joueurs qui ont suivi les programmes et exercices malgré quelques exercices extravagants, je dois l’avouer. Mais toujours en râlant, preuve qu’ils vont bien !

©️Louis-Adrien Le Blay

Les Jokers, et depuis quelques saisons maintenant, sont connus pour être une équipe rapide sur la glace. Peux-tu expliquer quel est le travail effectué avec toi, concernant ce facteur, en dehors de la glace ?

Tout cela réside dans la simplicité. Si les joueurs doivent être plus rapides, alors ils sprintent ; plus explosifs, alors ils sautent ; plus forts, alors ils soulèvent lourd ; … Cela peut sembler caricaturale, et ça l’est bien entendu, mais dans l’idée c’est ce que nous faisons.

Nous avons des marqueurs de performances comme le temps sur certaines distances de sprint (5m, 10m, …), des charges à atteindre, des hauteurs de sauts, … En fonction de leurs résultats, ils se voient attribuer un groupe. De là, va découler les mouvements, les charges, les distances de sprint, …

Au final, tout réside dans la gestion du volume d’entraînement que nous leur administrons.

Depuis début mai, on a pu remarquer par la communication sur les réseaux sociaux, que certains joueurs étaient encore entre tes mains. Que faites-vous depuis 2 mois ? Quel est l’enjeu de travailler en hors glace pendant l’été ?

Après les play-offs, il convient de les laisser au repos 2-3 semaines. Comme chacun peut se l’imaginer, cette épreuve est éprouvante pour les organismes. Une fois ce temps de régénération passée, nous avons commencé le 1er cycle. Il faut remettre les organismes en route : prise/perte de poids, travail sur leur qualités globales, travail autour de leurs petites blessures/douleurs, … Pour simplifier : une remise en charge progressive.

Actuellement, nous sommes à la fin du 2ème cycle qui est, sans hésitation, le plus dur des 3 : grosses intensités (poids sur les barres, cardio, …) et volume très élevé (nombre de répétitions). Les organismes commencent à souffrir pour certains. Plus qu’une semaine et ils auront 2 semaines de repos.

Le 3ème consistera à transitionner simplement vers la glace et renforcer très spécifiquement les muscles sollicités au hockey sur glace.

L’enjeu est simple : réduire au maximum le temps nécessaire entre le moment où ils recommencent à patiner et le moment où ils sont pleinement opérationnels.

Dès mi août, quel est le programme à tes côtés ?

Le travail sera principalement prophylactique. Lorsque le camp d’été reprend, la musculation pure passe au second plan et on se préoccupe principalement de mitiger les douleurs/risques de blessure. Ce camp est très éprouvant : ils peuvent aller jusqu’à deux entraînements par jour.

Ce moment est surtout propice aux discussions avec les joueurs pour connaître leurs problèmes, douleurs, points faibles, … Je m’occupe surtout de faire le lien avec les kinés, les rendez-vous médicaux pour certains, tests physiques, l’analyse de certaines données, …

Et pendant la saison ?

Cette saison sera encore différente des deux saisons précédentes, nous allons tester d’autres façons de s’entraîner. Nous travaillons un peu chaque jour, c’est ce que nous appelons du « micro-dosing ». Autrement, dit la dose minimale nécessaire pour les faire progresser.

Concrètement, cela se traduit par les faire sauter, sprinter, soulever, … tous les jours ! Comme je l’ai expliqué plus haut : tout réside dans le volume. Chaque jour suffira donc sa peine et, en fonction du moment de la semaine (veille de match ou non), nous adapterons les exercices, les intensités et le volume !

Ton objectif sur la saison à venir avec les gars ?

Continuer sur notre lancé : les rendre toujours plus forts, plus rapides et explosifs pour proposer davantage de jeu.

Dans l’optique, également, d’éviter tous types de blessure, sur la glace, et en minimisant les douleurs dans leur vie quotidienne. Après tout, ce sont des hommes quelconques et le hockey de haut-niveau reste une page de leur vie, pas leur famille.

#TOUSJOKERS